© 2002, Patrick Dubreucq, Association des amis du Musée Fabre
Depuis quelques années maintenant, l'orientalisme bénéficie d'un regain d'intérêt
qui a permis la redécouverte de peintres fort injustement oubliés par l'histoire.
Tel est le cas d'Alexandre Roubtzoff. Mais limiter ce dernier à ce seul thème,
par ailleurs vaste, serait une erreur grossière. Certes, sa place au sein du courant
orientaliste dont il fut, pour le XXe siècle, un des plus grands représentants,
n'est plus à discuter. Mais Roubtzoff appartenait en fait à cette race d'artiste
qui n'a jamais cru devoir s'en tenir à un genre ou un style précis. C'est à cela
sans doute que nous devons une œuvre extrêmement riche et variée, parfois singulière
au sein de la création contemporaine, dont il est grand temps de prendre enfin
connaissance.
Né à Saint-Pétersbourg,
le 24 janvier 1884, Alexandre Roubtzoff a passé les trente premières années de
sa vie dans cette Russie tsariste bien vite balayée par la Révolution d'Octobre.
Sa tante, Jekaterina Alexandrovna Wachter était peintre et l'initia au dessin
jouant un rôle prépondérant dans la future vocation du jeune homme. Plus importante
encore est la rencontre avec le peintre polonais Ivan Frantsevitch Zionglinski
(1858-1912) qui fut selon les propres mots de Roubtzoff “son guide dans la vie
et dans l'art”. Il est clair que sous l'égide de ce couple d'artistes, la peinture
est vite devenue l'objet de toutes ses préoccupations.
Entré en 1904 à l'Académie
Impériale de Beaux Arts de Saint-Pétersbourg, Alexandre Roubtzoff va suivre une
formation des plus académiques. C'est au cours de cette période qu'il se spécialise
dans un genre précis qui domine les débuts de sa production : la scène d'intérieur.
Son tableau de concours “Intérieur de s le Empire” (Musée de l'Ermitage) pour
lequel il obtient le Grand Prix de l'Académie et une bourse de voyage de quatre
ans, représente ainsi le Salon rouge du Palais Marieno, propriété du prince Paul
Galitzine, ami de l'artiste. Depuis le milieu du XIXE siècle, la peinture d'intérieur
jouissait d'un très grand prestige au sein de l'Académie. Un peintre comme Constantin
Oukhtomski (choisi pour représenter les salles du Nouvel Ermitage) l'avait hissée
à un haut degré de raffinement. De plus le genre offrait une source non négligeable
de commandes puisque les aristocrates demandaient très souvent aux artistes “d'immortaliser”
leurs palais et leurs intérieurs.
Roubtzoff continue cette tradition de l'art
aristocratique de Saint-Pétersbourg et son tableau “Intérieur de style Empire”
ne déroge pas à la règle inhérente à la peinture d'intérieur. Malgré la présence
à l'extrême droite de deux personnages suggérant une anecdote particulière, le
sujet, ici, n'a qu'une importance secondaire. Ce qui prime avant tout, c'est la
qualité de l'exécution, la science du détail. Chaque élément du décor est ainsi
reproduit avec précision et minutie et témoigne de la maîtrise confondante acquise
par Roubtzoff durant les six années passées à l'Académie. Le tableau rappelle
également les aspirations des artistes pétersbourgeois de la fin du XIXE siècle
qui se désintéressent de la peinture sociale à thèse des “peintres ambulants”
pour revenir au portrait, au paysage, au décor et qui préfèrent l'évocation du
temps passé à la représentation de la vie moderne. Par le mobilier de style Empire
russe, par le décolleté en carré et les robes longues et souples typique du Premier
Empire, l'œuvre de Roubtzoff se fait l'écho de ce “rétrospectivisme” (L.Réau)
ambiant.
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